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Inventer un instrument et l’observer grandir

Dans les premiers business plans rédigés par Jules et Bruno, les co-fondateurs de la société Dualo SAS, il était expliqué que pour qu’un instrument de musique existe et vive, il fallait réunir trois éléments :
– des luthiers d’exception (exemple pour le violon : Nicolas Amati et Antonio Stradivari) ;
– des compositeurs de génie (exemple pour le violon : Pachelbel, Vivaldi, Bach, …) ;
– des interprètes virtuoses (exemple pour le violon : Claudio Monteverdi, Jean-Baptiste Lully, Niccolo Paganini, …).

Ainsi, lors de la conception des premiers instruments dualo, l’équipe Dualo avait toujours en tête ce triptyque :
– en ce qui concerne la lutherie, c’est évidemment l’équipe Dualo ;
– pour les compositions, l’objectif des instruments dualo était clair : pouvoir rejouer une grande partie du répertoire des musiques actuelles, et particulièrement les musiques urbaines et électroniques ;
– quant aux interprètes, c’est d’abord l’ensemble des gens qui allaient acheter un dualo et jouer avec.

Il y a un point sur lequel il est important d’insister, c’est que depuis toujours l’équipe Dualo était convaincue qu’en concevant les instruments dualo, ils se placeraient comme les créateurs d’une proposition. Et que ce seraient les joueurs qui, par leur usage de l’instrument, en façonneraient les contours définitifs, le feraient évoluer dans telle ou telle direction. L’histoire des instruments dualo est ainsi parsemée d’anecdotes d’effets de bord ou de bugs qui furent exploités par les joueurs et qui sont devenus par la suite des fonctionnalités à part entière.

Ainsi grâce aux quelques centaines de du-touch Pro dans la nature, l’équipe Dualo a pu s’émerveiller de voir l’instrument grandir et des usages, pas forcément anticipés, apparaître.

Une des surprises fut dans le traitement des médias à propos du du-touch Pro, mettant particulièrement en avant son potentiel pédagogique et sa rapidité de prise en main. Au final c’est plus de 50% de débutants en musique qui achetèrent un du-touch Pro.

Imaginer la guitare du XXIe siècle

Quand, encore adolescents, Jules et Bruno ont commencé à jouer de la musique, ils se sont naturellement tournés vers la guitare. Dans les années 90, c’était l’instrument idéal pour jouer la musique qu’ils écoutaient, de Brassens à Nirvana, en passant par Metallica, Jimi Hendrix, et tout le Rock, la Pop, le Métal et leurs dérivés, dont les instruments principaux étaient la batterie, la basse, la guitare et le chant.

À cette époque, il suffisait donc d’une guitare pour rejouer entre amis, en soirée, autour d’un feu, les musiques populaires.

Aujourd’hui, lorsqu’on est adolescent et qu’on écoute des musiques urbaines et électroniques, c’est-à-dire les courants majeurs depuis les années 2010, il n’est pas possible de les rejouer sans un ordinateur et beaucoup de matériel. Fini les soirées entre potes à jouer simplement la musique qu’on aime.

Au fur et à mesure de l’avancée dans la conception des instruments dualo, est ainsi apparu, entre une envie et le constat de ce manque, l’objectif d’essayer de créer “la guitare des musiques urbaines et électroniques”.

Il fallait donc que le du-touch Pro soit aussi versatile qu’un synthétiseur, permettre de créer des morceaux entiers comme un logiciel sur ordinateur et aussi portable qu’une guitare pour pouvoir être emmené partout.

Sur ce point le pari fut réussi, car certains joueurs talentueux n’hésitaient pas à sortir leur dualo dans le métro parisien, entre deux soirées, et à composer en quelques dizaines de secondes une instru de Hip-Hop et à faire rapper les copains !

Un clavier dualo réduit pour le du-touch S

Le du-touch Pro, à cause de son grand nombre de touches (116) et donc de son grand nombre de LEDs en dessous des touches, était vendu 990€. Face à de nombreux retours de personnes, notamment des débutants en musique, qui étaient tentées par l’expérience des instruments dualo mais pour qui cela représentait un gros investissement, surtout dans le contexte de débuter la musique, l’équipe Dualo se mit à réfléchir dès 2015 à un dualo plus petit, avec moins de touches.

Ce nouveau dualo serait le moyen de servir la noble mission de démocratisation de la pratique et de la création musicale que s’était fixée l’équipe dualo. Moins de touches, moins cher, encore plus compact et facile à transporter, tel était le premier cahier des charges de ce nouvel instrument.

Il fallait donc réduire la taille du clavier, tout en conservant la logique et le potentiel du principe dualo. Premier impact : un nombre réduit d’octaves, de 5 octaves sur le du-touch Pro, nous passons à 3 octaves sur le du-touch S, en intégrant toutefois un raccourci pour changer d’octave rapidement (maintenir le bouton son + caresser le slider droit).

Sur un du-touch Pro, chaque clavier est entièrement chromatique, c’est-à-dire qu’il contient toutes les notes qui existent, et suivant le principe dualo, chaque clavier est constitué d’un empilement de lignes de 3 et 4 touches.

Sur le du-touch S, après de longs mois de réflexions et d’essais, il a été décidé que ces lignes de 4 touches deviennent des lignes de 2 touches, en enlevant les notes enharmoniques (c’est-à-dire qui font le même son) que l’on peut retrouver sur l’autre clavier (ex : fa bémol = mi dièse sur l’autre clavier, ou encore si double-bémol = la sur l’autre clavier). Sur une ligne de 3 touches, le do bémol (= si dièse sur l’autre clavier) a toutefois été conservé.

Notes du clavier dualo sur le du-touch S : en gris, les notes retirées et présentes sur le du-touch Pro

Exemple d’un accord diminué 7 (en vert). Sur le du-touch Pro on peut le jouer à la fois sur le clavier gauche en entier ou sur le clavier droit en déplaçant les deux dernières notes (en rouge). Sur le du-touch S nous sommes obligés de le jouer à gauche.

Les claviers de ce nouveau modèle ne sont donc plus entièrement chromatiques, mais davantage complémentaires : il est nécessaire d’utiliser les deux claviers pour jouer toutes les notes.

Le du-touch S, version plus abordable du du-touch Pro

Au-delà du clavier, l’équipe Dualo travailla donc à réduire au maximum le prix de fabrication du du-touch S, en collaboration avec le studio NoDesign.net qui fut choisi pour en réaliser le design.

Pour une raison de coûts, il fallait limiter le nombre de cartes électroniques. Il fut ainsi décidé que les sliders latéraux, initialement placés sur les bords extérieurs de la coque du du-touch Pro, soient réunis sur une seule carte et placés sur la face avant du du-touch S de part et d’autre du slider central. De plus, cela eut aussi un impact positif sur la jouabilité, car il est désormais possible d’accéder aisément à ces deux sliders avec les deux mains.

Ensuite, le du-touch S s’adressant à un public moins averti, il fut décidé de retirer la prise MIDI DIN 5 broches présente sur le du-touch Pro, pour ne garder qu’un port MIDI sur la prise USB. La sortie stéréo niveau ligne sur jack 6.35mm, utile pour se brancher sur une grosse sono fut aussi retirée, pour ne garder qu’une sortie sur jack stéréo 3.5mm, servant à la fois de sortie casque et de sortie ligne.

Du du-touch Pro (à gauche), le du-touch S (à droite) ne conservera que la prise minijack et USB.

Enfin, la vitre fumée sur le haut du du-touch Pro fut simplifiée pour diminuer le coût de la pièce et de la gravure des logos.

Tanguy teste le nouveau clavier du du-touch S.

Les débuts d’une conception modulaire

Présentant déjà des enjeux écologiques importants, l’équipe Dualo intégra dès la conception du du-touch S la nécessité de réutiliser des composants existants et de proposer une architecture modulaire.

Ainsi il fut décidé de concevoir ce que nous appelions “l’araignée”, à savoir une pièce mécanique sur laquelle tous les éléments électroniques pourraient être fixés, indépendamment de la coque qui les entourent et qui forme le design externe de l’instrument.

Pour permettre aux possesseurs d’un du-touch Pro de réutiliser leurs accessoires, le design de la ceinture du-belt ne changea pas, et il est donc possible d’utiliser la ceinture pour les deux instruments.

Tanguy chez Carest, le mouliste. On remarque une ceinture et deux faces arrières, l’une du du-touch S et l’autre du du-touch Pro

Aussi, il fut décidé de séparer sur deux cartes électroniques les composants chers et complexes comme le processeur principal, la puce de synthèse sonore, les puces de mémoire pour les banques de sons, et sur une autre cartes les éléments logiques permettant de gérer l’alimentation, la charge de la batterie, l’acquisition des boutons et des capteurs de force sous les touches.

Cette séparation a plusieurs avantages :
– le nombre de couches de chaque carte peut être ajustée selon sa complexité : des cartes plus simples à concevoir, plus simples à fabriquer ;
– en cas de panne, seule la carte défectueuse est remplacée et cela limite les composants inutilisables ;
– si de nouvelles fonctionnalités hardware doivent être ajoutées, il est possible de le faire en concevant une nouvelle carte, sans toucher aux autres.

De plus, il était à la base prévu de pouvoir choisir la quantité de mémoire pour les banques de sons : 1Go, 2Go, 4Go ou 8Go. La mémoire étant sur une carte spécifique, il aurait suffit de seulement changer cette carte pour augmenter la mémoire de son du-touch S. Cela aurait aussi permis une gestion des stocks de cartes électronique plus fine. A ce jour, seule la carte contenant 2Go à été produite, car il n’y a jamais eu de réelle nécessité d’avoir plus de mémoire.

Équipée d’une nouvelle puce de synthèse

La mémoire interne de 256 Mo du du-touch Pro était suffisante pour la centaine de sons de la banque de sons dualo officielle, relativement légers en taille mémoire. Mais la possibilité de créer et d’intégrer ses propres sons, fonctionnalité ajoutée en 2015, a vite montré les limites de cet espace mémoire restreint.

Une anecdote industrielle tomba à point nommé à ce moment-là : le fabricant des puces de synthèse sonore fut obligé de déménager de son usine historique et parce qu’il aurait coûté trop cher de déplacer les lignes de production des puces de l’époque dans une autre usine, ils décidèrent d’accélérer le développement et la fabrication de nouvelles puces, attendues depuis plusieurs années.

Le du-touch S intégra alors cette nouvelle génération de puce de synthèse et il fut équipé d’une mémoire de 2Go. Cette taille mémoire permet aujourd’hui d’embarquer la banque de sons Intuitive Instruments officielle, ainsi que plusieurs du-games – plutôt gourmands en mémoire à cause du fichier contenant la voix du professeur. Elle permit de développer des banques de sons plus riches et réalistes, notamment pour les sons acoustiques, composés de davantage de samples et de layers de vélocité.

Initialement, le nombre d’emplacements de sons correspondait au nombre de touches des deux claviers : 116 sur le du-touch Pro, il était au départ de 52 sur le du-touch S. Mais avec les 2Go de mémoire, il est vite apparu qu’il fallait résoudre cette contrainte. En 2019, une mise-à-jour a porté ce nombre sur le du-touch S de 52 à 147, grâce à l’ajout de pages sur les 3 dernières touches du clavier gauche. Quitte à l’avoir fait pour les banques de sons, et par souci de cohérence de design, ce système de pages fut aussi ajouté pour les emplacements de morceaux sur le clavier gauche, qui est donc passé de 26 à 69.

Et intégrant un processeur plus puissant taillé pour l’avenir

En réaction au processeur du du-touch Pro qui a rapidement montré des limites sur la quantité de fonctionnalités qu’il serait capable de supporter, l’équipe Dualo pris le parti de surdimensionner le processeur du du-touch S, anticipant de toutes les idées qui germeraient au cours des années suivantes, notamment la partie pédagogie, portée par le du-game.

Il y a tant à dire encore sur le du-touch S, que cela fera l’objet d’un prochain article ! Nous vous laissons pour aujourd’hui avec une vidéo de l’assemblage du du-touch S.

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